mercredi 16 septembre 2009

Découverte d'un nouveau site archéologique en Équateur

C'est un aventurier Allemand Frank Alte très proche de Surtrek (collaboration depuis plus de 10 ans autour de la création d'expédition en Équateur) qui est le père de cette découverte.
Voici le récit de sa découverte.


Expédition dans l’histoire des Andes Equatoriennes

Cette aventure commença en 2008, lorsque mon épouse et moi sommes partis pour un périple dans le sud des Andes équatoriennes à travers les villes Andines de Catamayo, Gonzanama et Quilanga, dans la province de Loja, en Equateur. Après quelques jours de voyage en voiture, à pied et à cheval, nous avons finalement rejoint le village de San Antonio de las Aradas, situé sur le versant ouest de la cordillère de Sabanilla. Ce lieu peu connu mais non moins fascinant, nous a permis de nous reposer dans un environnement extrêmement calme en comparaison avec la ville de Vilcabamba devenue très touristique à cause de sa réputation comme lieu de longévité.

A San Antonio de las Aradas, Don José, un ancien chasseur reconverti en petit producteur de café, eut l’extrême générosité de nous inviter à passer quelques jours dans sa finca (ferme) en compagnie de sa famille. Par chance, notre visite coïncidait avec la récolte du café et nous avons été suffisamment chanceux pour pouvoir passer ces quelques jours dans ce lieu riche en culture et de découvrir tout le processus de fabrication du café depuis la récolte, le séchage et la sélection en passant par le décorticage et la torréfaction. Nos veillées n’en étaient pas moins captivantes, Don José nous fascinait avec ses histoires et légendes des montagnes environnantes. Au cours de nos conversations, une chose attira plus particulièrement notre attention: l'existence de ruines mystérieuses cachées dans les hauteurs de la cordillère.

Nous avons, par la suite, planifié une randonnée depuis San Antonio de las Aradas en suivant un ancien sentier pré-Inca jusqu'à la montagne "Loma Plaza del Inca" (La Colline des Incas) pour redescendre vers Tumianuma, à quelques kilomètres au sud de Vilcabamba. Nous nous sommes orientés en utilisant des cartes topographiques, acquises à Quito à l'IGM (Instituto Geografico Militar) et avons traversé les montagnes du "Camino del Inca" (Le Chemin de l’Inca). Cette expérience fabuleuse, avec comme trame de fond d’en apprendre d’avantage sur ces « ruines mystérieuses » nous a conduit à organiser une deuxième expédition dans cette région pittoresque, en étudiant plus en détail cette magnifique chaîne de montagnes.

L'organisation et la préparation de cette nouvelle expédition à San Antonio de las Aradas a pris plusieurs mois. Enfin, bien préparés et prêts à trouver ces ruines mystérieuses mentionnées par Don José, nous avons pris la direction, avec Alci Gaona, du petit village fascinant de la Cordillère de Sabanilla.

Début de l’expédition: 22 Juin 2009

Au levé du jour, mon compagnon et moi même, partîmes tranquillement de San Antonio de las Aradas vers la base des montagnes à 2840m - prêts à parcourir les immenses et magnifiques Andes.

Aidés par un cheval et un muletier, nos courageux porteurs chargés de nos sacs à dos, nous quittâmes Las Aradas à 1900m d’altitude, pour rejoindre tôt dans l’après-midi notre premier camp de base, trop à bout de souffle pour parler, mais reversés par les paysages qui s’offraient à nos yeux.

Comme toujours, après l'enchantement du cadre, nous installâmes notre camp et nous mimes en quête d'eau, ce qui se transforma en une mini-expédition. Finalement, soulagés, nous avons découvert une source d'eau à 15 min en contrebas de notre camp, ignorant les ennuis que nous causerait le manque d'eau les jours suivants. Nous avons payé et remercier nos porteurs, qui sont rentrés sur San Antonio de las Aradas, pour consentir à un repos bien mérité.

Depuis le départ du petit village, le temps était légèrement changeable et frais, parfait pour notre expédition et c’est à partir de notre troisième jour d'exploration qu’il en fut tout autrement. Des vents forts et une pluie glaciale nous ont accompagnés partout où nous sommes allés, nous renversant plusieurs fois lors de la traversée d'arêtes. De lourds nuages nous cachaient tous nos points de référence, rendant ces pays sauvages extrêmement dangereux et nous laissant aucun autre choix que de retourner à notre campement. Cependant, comme le climat commençait à affecter notre moral, les nuages se sont soudainement ouverts, dégageant l'horizon et offrant à notre vue deux ruines d'une construction formant des lignes circulaires concentriques régulières sur les collines au-dessous de nous; peut-être les ruines que nous cherchions ? En tous cas elles représentaient très certainement la marque de l´homme.

Nous sommes restés là quelques minutes, profitant de la vue, contemplant notre découverte puis, sortis de notre rêverie, nous nous somme mis à étudier la route jusqu'aux premières ruines qui semblaient s'étendre sur le versant en haut duquel nous nous trouvions. Toutefois, le Paramo (végétation basse et dense typique des hautes terres des Andes) a été impitoyable, quasi impraticable, mais pire encore, le chemin débouchait sur la végétation de la forêt Équatoriale humide qui nous fut impossible de franchir nous contraignant à remonter une crête pour chercher une autre voie plus accessible.

Après une autre remontée de nuages, nous avons finalement décidé de retourner au camp, enthousiasmés par la découverte de ces cercles curieux, mais un peu frustrés par la météo et les difficultés qui nous faisaient face pour atteindre le site. Comme tout bon camp dans le Paramo, le froid, les nuits venteuses et pluvieuses accompagnent vos veillées, mais ne sont pas les conditions idéales pour un repos tranquille!

La pluie, des vents très forts, des nuages et des températures basses nous ont accueillis à notre réveil. Nous avions fermement décidé d'explorer un nouveau parcours descendant vers la deuxième ruine: Nous sommes remontés sur le flanc de la montagne pour installer notre camp suivant à 3340m. La chance était de notre côté, à chaque fois que nous pensions que notre quête était perdue, les nuages se déchiraient nous dégageant la vue et nous fournissant l'énergie supplémentaire pour continuer nos recherches; lorsque nous avons monté notre camp suivant nous avions une vue parfaitement claire sur les ruines avec un arc-en-ciel spectaculaire semblant sortir d'elles!

Après une autre nuit pluvieuse, l’aube du 5ème jour nous accueillit avec un froid pénétrant. Nous étions prêts à descendre et explorer les ruines sur un nouveau passage que nous avions élaboré. Le temps semblait s'améliorer et nous enlevions des couches de vêtement au fur et à mesure de notre descente. Tandis que nous nous mettions à l'aise, un mouvement soudain attira notre regard de l'autre côté de la ravine, une forme sombre sembla sortir d'un buisson; un grand ours male des Andes (l'Ours à lunettes - Tremarctos ornatus) nous observait à moins de 60m et semblait aussi stupéfait que nous.

Cet ours énorme sans doute essayait de se cacher derrière un petit buisson, jouant comme un enfant à "si je ne peux pas vous voir, vous ne pouvez pas me voir" en nous observant avec sa prudence instinctive. Cette scène amusante a duré quelques minutes jusqu'à ce que l'ours ait probablement compris que nous n'avions pas l'intention de bouger; il est parti précipitamment, zigzagant, disparaissant entre les arbres de la forêt nuageuse. Cette rencontre inattendue nous a laissés sans voix: nous sommes restés quelques instants dans le calme, scrutant la tache sombre dans laquelle l'ours venait de s'engouffrer, espérant l'apercevoir une dernière fois.


Nous avons passé le jour suivant à explorer les ruines et leurs environs. Nous avons continué à penser à l'ours marchant à travers des buissons d'Achupallas (Puya clavaherculis) selon la rumeur publique l'alimentation préférée de l'ours. Nous avons atteint les premières ruines à 2776m d'altitude sur le sommet d’une colline sur les pentes du côté occidental de la Cordillère de Sabanilla. Il y avait trois cercles de pierres concentriques, protégées par un fossé d'un mètre de profondeur. Dans l'ensemble, l'édifice avait beaucoup souffert de l'usure du temps et nous avons conclu que ces constructions avaient été construites par la culture pré-inca des Palta (le secteur a été peuplé par le Calvas et les Malacatas qui ensemble avec d'autres tribus formèrent la culture Palta) et dataient d'au moins 500 ans.

Nous avons fait des relevés du site, prenant des photos, des vidéos et ses coordonnées GPS avant que les nuages ne nous aient enveloppés dans une brume blanche dense. L'après-midi, nous avons pris la direction de l’autre site aperçu, montant notre camp prêt d'un petit cours d'eau.

Le matin du sixième jour, nous avons commencé notre randonnée sous le soleil et rejoint le second site tôt dans la matinée. En comparaison avec l'autre site, celui-ci à 2852m d'altitude, a été étonnamment bien préservé, quelque peu protégé par la Cordillère. Ce site archéologique fut construit sur les mêmes bases issues de la culture Palta, les murs hauts 2 mètres par endroit, donnent une idée plus claire des techniques de construction utilisées; des escaliers en pierre conduisent jusqu'à ce qui était peut-être autrefois une fortification.

La civilisation Palta fut conquise par les Incas qui réduirent à néant leur culture en imposant leur propre style de vie. Quelques décennies plus tard les Conquistadors espagnols terminèrent le travail des Incas, ne laissant presque aucune trace de leurs cultures, leurs peuples, leurs traditions et leurs constructions. De nos jours, il ne subsiste que peu de trace des Paltas qui peuplèrent la plus grande partie de la région de Loja en Équateur. Nous nous sommes rendus compte au fur et à mesure de nos investigations, que les Paltas étaient presque inconnus, et qu'ils étaient présents dans seulement quelques mythes et légendes des habitants de la région.

Nous sommes restés de nombreuses heures à cartographier le site, faire des relevés, prendre des photos jusqu'à ce que nous ne puissions plus retarder l'heure de notre départ. Il nous restait une longue marche de retour à travers un terrain accidenté accompagnés de conditions climatiques peu clémentes, mais la perspective d'une bonne douche et d'un lit confortable nous donnait l'énergie suffisante pour ne pas trop traîner les pieds. Nous avons décidé de ne pas monter de camp mais de marcher fatigués et affamés jusqu'à rejoindre au coucher du soleil même avec le corps couvert de crampes, la route de Las Aradas.

Ayant été perdus durant plusieurs jours dans ce désert à la recherche de cultures oubliées, dans un confort quelque peu spartiate, le corps exténué, repu de courbatures, c'est avec joie que nous avons accueilli la technologie du 21ème siècle. Grâce à un outil que l'on nomme téléphone mobile, nous avons pu contacter Don José et qu'il a eu l'amabilité de venir nous chercher sur la route.

Bien qu'épuisés, nous avons passé notre soirée à raconter notre aventure autour de ces ruines mystérieuses à Don José, enchanté d'entendre dire que les légendes de la région étaient vraies!

De retour dans la ville de Loja, nous avons annoncé nos découvertes à l'INPC de Loja (Instituto Nacional de Patrimonio Culturel de Loja) qui nous a accordé le titre de "Découvreurs" des deux sites et a assuré qu'il commencerait à examiner les sites dès que possible, et mettrait en route les démarches pour les protéger et découvrir leur signification. Jusqu'ici les archéologues de l'INPC supposent que les ruines pourraient avoir servi de temples ou de forteresses. Ils planifient des fouilles archéologiques pour 2010 en vue de démêler ce mystère. En attendant nous planifions notre expédition suivante dans les Montagnes de Sabanilla pour octobre 2009, et continuons nos investigations …

Texte de Frank Alte traduit en Français par François Cambe. Frank Alte vit depuis de nombreuses années en Équateur et a fondé depuis quelques temps sa propre agence de tourisme EGT et collabore de manière active avec Surtrek. Il explore le pays cherchant de nouvelles routes et parcours toujours plus aventureux. Images par Frank Alte et Alci Gaona. Pour suivre toutes les aventures de Frank Alte, rendez-vous sur le blog:

http://theexpeditiondepartment.blogspot.com/